Analyse

Pourquoi Suzuki doit choisir le successeur de Brivio en interne

Le départ de Davide Brivio de Suzuki confronte la marque japonaise à un dilemme : recruter un nouveau directeur d'équipe ou confier le poste à une personne capable de maintenir la philosophie actuelle.

Davide Brivio

Davide Brivio

Gold and Goose / Motorsport Images

Davide Brivio a créé la surprise en décidant de quitter le team Suzuki en MotoGP pour Alpine en F1, où il devrait être rapidement confirmé au poste de directeur général. La surprise est d'autant plus forte que la décision est tombée un mois et demi à peine après le doublé de la marque de Hamamatsu et son premier titre en 20 ans, grâce à Joan Mir.

Mais plusieurs analyses de la situation sont possibles et s'il y a une certitude, c'est que le sacre du pilote espagnol est venu conclure l'une des saisons les plus étranges de l'histoire du championnat. Le format de la saison a été profondément influencé par le COVID-19, avec un calendrier réduit à 14 courses sur seulement neuf circuits. Si cela ne suffisait pas, Marc Márquez – Champion du monde lors de six des sept saisons précédentes – s'est grièvement blessé lors de la première manche et n'a pas encore pu reprendre la compétition.

Le mérite de Mir ne fait aucun doute, mais il est certain que les circonstances dans lesquelles il a triomphé l'an dernier ne se reproduiront pas à l'identique. Le pilote espagnol n'a pas seulement profité de l'absence de Márquez, mais aussi des difficultés de Yamaha, de l'inconstance de Ducati et du manque d'expérience de KTM. Ce contexte permet de mieux comprendre pourquoi Brivio – l'homme derrière le retour de Suzuki en MotoGP en 2015, ses progrès dans les saisons suivantes et finalement ses succès – a accepté un si gros défi dans l'univers pourtant hostile de la Formule 1.

Davide Brivio, Joan Mir, Team Suzuki

En MotoGP, Brivio pourrait difficilement bénéficier d'une meilleure image que celle dont il jouit actuellement et il sera probablement toujours accueilli à bras ouverts à l'avenir, après avoir démontré être l'un des meilleurs dirigeants du paddock. Après tout, c'est l'Italien qui a convaincu Valentino Rossi de quitter Honda et de rejoindre Yamaha en 2004, c'est lui qui a recruté Jorge Lorenzo avant même que le Majorquin ne remporte le titre en 250cc en 2006 et c'est lui qui a fait parler son expérience pour faire travailler de concert des structures européenne et japonaise chez Suzuki. Pour toutes ces raisons, son départ va se ressentir chez le constructeur champion en titre et trouver un successeur au profil similaire sera une tâche ardue.

"Le départ de Davide laisse un vide immense – nous nous sentons un peu orphelins", a confié une source interne à Suzuki à Motorsport.com. "Il est important que les gens comprennent que c'est lui qui a bâti ce programme en partant de rien, de l'achat des premiers camions à tout ce qui a suivi. C'est un groupe de personnes particulier parce que Davide a recruté tout le monde, pas seulement pour notre expérience professionnelle, mais aussi pour le caractère de chaque individu."

Maintenant, les dirigeants de la marque font face à un dilemme important, qui définira son avenir à moyen terme et dans la durée. L'homme en charge de trouver le successeur de Brivio, qu'il s'agisse d'une personne faisant déjà partie de l'équipe ou d'une recrue, est Shinichi Sahara, leader du projet. Le vieux proverbe disant "si quelque chose n'est pas cassé, ne le répare pas" pourrait s'appliquer, dans le cas où Suzuki souhaiterait maintenir la philosophie qui lui a si bien réussi. Les récents succès reposent sur de jeunes pilotes, un développement étape par étape et des évolutions permanentes sans prise de risque importante, afin de limiter la marge d'erreur.

Shinichi Sahara, Team Suzuki MotoGP

À en croire la déclaration de Sahara dans le communiqué de presse confirmant le départ de Brivio, un remplaçant choisi en interne est la solution la plus probable : "2021 sera une année encore plus importante pour que nous puissions poursuivre sur cette lancée" a-t-il indiqué. "Nous essayons désormais de trouver le meilleur moyen de combler la perte de Davide. Heureusement, dans la plupart des cas, ma façon de penser a été assez similaire à la sienne, et je pense donc qu'il ne sera pas trop difficile de maintenir la direction que nous devrions prendre pour le team Suzuki Ecstar."

Au sein de l'équipe, cette option est également privilégiée : "Maintenant, les gens ont un peu peur que quelqu'un vienne de l'extérieur", a reconnu notre source interne. "Je pense que la solution la plus intelligente est de travailler entre nous et de maintenir la confiance dans les personnes qui nous ont permis d'atteindre ce niveau."

Une promotion en interne permettrait de renforcer la confiance dans le groupe à un moment délicat, le départ d'un Brivio qui faisait consensus pouvant troubler l'équilibre. Si une chose est devenue évidente la saison dernière, c'est qu'en plus d'avoir deux pilotes de premier plan, Suzuki bénéficie d'une cohésion qui lui permet d'éviter les rivalités vues dans d'autres garages.

Si Brivio avait déjà des difficultés à rassembler le budget nécessaire pour faire tourner une équipe de MotoGP, ce sera encore plus difficile pour celui qui reprendra les rênes. Une autre tâche qui attend le nouveau patron est la création d'une équipe satellite, un projet régulièrement repoussé et qui doit encore être confirmé. Et il ne font pas oublier les pilotes, Joan Mir et Álex Rins, qui ont toujours apprécié la confiance placée en eux. Le respect mutuel qu'ils ont toujours affiché, malgré le fait qu'ils jouaient tous les deux le titre, reflète l'harmonie chez Suzuki, que le nouveau team manager devra à tout prix maintenir.

Joan Mir, Team Suzuki MotoGP, Davide Brivio

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