Analyse

Comment Alpine compte jouer la victoire au Mans

C'est avec ambition que l'Alpine Endurance Team aborde la saison 2021 du FIA WEC, et notamment les 24 Heures du Mans.

André Negrão, Nicolas Lapierre et Matthieu Vaxiviere avec l'Alpine A480 LMP1

André Negrão, Nicolas Lapierre et Matthieu Vaxiviere avec l'Alpine A480 LMP1

Alpine

Alpine est de retour dans la catégorie reine de l'Endurance, et après plusieurs saisons couronnées de succès en LMP2, a présenté son nouveau prototype : l'A480, qui n'est autre qu'une Rebellion R-13 rebadgée. La marque française sera la seule à engager une LMP1 dans la nouvelle catégorie reine, l'Hypercar, aux côtés des quatre bolides répondant à la nouvelle réglementation – deux inscrits par Toyota, deux par Glickenhaus.

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Quels objectifs ?

L'Alpine Endurance Team et ses pilotes ne manquent pas d'ambition, comme en témoignent les propos du fer de lance de l'écurie, Nicolas Lapierre. Le vétéran français a la ferme intention de faire honneur au palmarès de la marque, victorieuse au général en 1978 puis en LMP2 à trois reprises de 2016 à 2019. Un triomphe au général cette année ? "Clairement, c'est pour ça que nous sommes là", déclare Lapierre sans détour. "Bien sûr, quatre victoires au Mans, c'est incroyable, c'est un succès. Mais en tant que pilote, la catégorie dans laquelle je veux avoir du succès est la première, l'Hypercar."

"Nous sommes au tout début de cette catégorie et je pense que le timing est excellent pour qu'Alpine fasse son retour dans cette catégorie, ainsi que pour moi-même, après avoir signé ces succès en LMP2. Je suis content d'être de retour dans la catégorie reine, et je vais essayer d'y remporter une victoire."

C'est effectivement un retour dans l'élite pour Lapierre, qui était chez Toyota de 2012 à 2014 ainsi qu'en 2017. Pour ses deux coéquipiers, André Negrão et Matthieu Vaxiviere, ce seront en revanche des premiers pas à ce niveau. De quoi ressentir "un petit peu" de pression, reconnaît volontiers le Brésilien. "Mais nous avons de bons ingénieurs, j'ai deux gars dans la voiture à qui je peux faire confiance à 100%", tempère-t-il aussitôt. "Nous sommes entre de bonnes mains."

"Bien sûr, nous avons la pression de gagner et de faire un bon résultat en LMP1, de voir Alpine au sommet du classement, mais il faut y aller pas à pas. Il n'y a pas de raison de se précipiter au début. D'abord, ce sont des longues courses, il y a six courses, et bien sûr il faut arriver au Mans avec beaucoup de kilomètres pour comprendre la voiture et être super au Mans."

Alpine A480 LMP1

Quel développement pour l'A480 ?

Ce que l'on peut retenir de la conférence de presse d'Alpine, c'est que développer le prototype fourni par Oreca sera possible mais manifestement pas la priorité. "Nous pouvons développer la voiture, mais pour l'instant, notre principal souci est de bien maîtriser la nouvelle réglementation et de bien gérer tous les nouveaux procédés, systèmes électroniques et environnements, notamment informatiques", détaille Philippe Sinault, directeur d'équipe. "Ce n'est pas facile pour nous, et nous devons nous concentrer là-dessus. La voiture est déjà fiable, nous devons donc travailler pour bien utiliser ce nouvel outil."

La fiabilité, effectivement, était au rendez-vous l'an passé pour les Rebellion R-13, qui n'ont pas rencontré de problème majeur au Mans et ont franchi le drapeau à damier à cinq et six tours de la Toyota de tête.

Et s'il était commun lors de l'ère LMP1 que les prototypes de l'élite disposent de deux kits aéro – un à faible appui pour Spa-Francorchamps et Le Mans, et un à fort appui pour les autres pistes – ce ne sera pas le cas pour Alpine cette saison, pour une raison très simple. "Nous n'utiliserons qu'un kit, celui à faible appui, car la réglementation et la Balance de Performance nous imposent d'utiliser ce kit", explique Sinault. "En tout cas, même avec ce kit, nous avons beaucoup d'appui."

LMP1 vs Hypercar

Bien entendu, dans un contexte où Alpine va engager une LMP1, et Toyota et Glickenhaus des Hypercars, tous les regards seront tournés vers la comparaison entre ces deux types de voitures. Avec son expérience, Lapierre est la personne idéale pour dresser une telle comparaison.

"Nous n'avons pas la puissance hybride à gérer, ce qui nous facilite la vie en matière de stratégie", analyse le Français. "En revanche, c'est un petit désavantage par rapport aux voitures hybrides, qui ont quatre roues motrices. Même si la réglementation change un peu cette année, cela va rester un petit avantage pour eux en matière d'usure des pneus, d'adhérence ; dans des conditions délicates, on préférerait avoir ces quatre roues motrices. Mais notre voiture a ses points forts, elle est probablement plus facile à exploiter. Cela va être intéressant de voir la bataille en piste des deux technologies."

N'engager qu'une seule voiture semble en tout cas être un désavantage clair, notamment lors de 24 Heures du Mans qui sont toujours particulièrement imprévisibles, mais André Negrão n'est pas d'accord. "Comme l'a dit Philippe, cette voiture a une très bonne fiabilité, depuis quelques années nous savons que cette voiture est fiable", souligne-t-il. "Elle a fait beaucoup de courses au Mans, beaucoup de tours, nous savons qu'elle fonctionne très bien."

Alpine A480 LMP1

Quel impact pour la BoP ?

Un aspect de la réglementation jouera un rôle crucial dans la bataille pour la victoire : la Balance de Performance. Déjà expérimentée en GTE ainsi qu'en LMP1 (sous une forme un peu différente, celle de l'Équivalence de Technologie), elle aura pour but d'assurer une compétition équitable entre les Hypercars de Toyota et de Glickenhaus et la LMP1 d'Alpine, qui devrait être ralentie pour ne pas dominer ses rivales. En effet, des chronos aux alentours de 3'30 sont attendus au Mans avec la nouvelle réglementation Hypercar.

La BoP n'est en tout cas pas source d'inquiétude au sein de l'écurie tricolore. "La Balance de Performance est un travail en cours", commente Sinault. "Ce que je peux dire, c'est que la FIA et l'ACO font un travail énorme. Le sujet est vraiment difficile. Je suis relativement confiant : c'est dans l'intérêt de tout le monde, surtout pour l'Endurance et pour les 24 Heures du Mans, que tout le monde sur la grille dans la catégorie reine soit au même niveau avec une bonne Balance de Performance."

Peut-on s'attendre à ce que cette BoP évolue d'un circuit à l'autre ? "Oui", répond Sinault sans hésiter. "Nous avons tant de circuits différents dans le championnat – si l'on compare Portimão et Le Mans, ce n'est pas la même histoire – que nous aurons des changements entre chaque course, voire entre chaque séance. Cela fait partie du jeu, nous sommes bien préparés pour gérer ça. C'est un nouvel environnement pour nous."

Des synergies importantes

Logiquement contactée par de nombreux pilotes en vue de son passage en LMP1, l'écurie Alpine Endurance Team a fait confiance à deux hommes avec qui elle a déjà connu le succès en LMP2, Nicolas Lapierre et André Negrão, rejoints par Matthieu Vaxiviere, et la synergie entre les trois pilotes est évidemment cruciale dans une discipline comme l'Endurance. Après de premiers essais à Motorland Aragón en février dernier, elle est apparemment déjà présente, indique Vaxiviere : "C'est très important dans une équipe d'Endurance, au niveau du line-up. Jusqu'à présent, nous avons la même sensation dans la voiture, le même feedback lors des essais de Motorland."

Une autre synergie, qui pourrait venir plus tard, est celle avec l'écurie de Formule 1 éponyme, Alpine F1 Team, anciennement connue sous le nom de Renault. Mais tout comme le développement de l'A480, ce n'est pas la priorité pour l'instant. "À ce stade, nous n'avons pas mis en place de synergie, mais il est clair qu'il y a des sujets à étudier", analyse Sinault.

"Si nous en avons besoin, je pense qu'à un moment je passerai un coup de fil à Viry-Châtillon ou à Enstone pour dire 'eh les gars, est-ce que vous pouvez nous aider là-dessus ?', mais pour l'instant c'est trop tôt : nous avons tellement de choses à bien comprendre de notre côté. Mais j'espère que nous pourrons avoir des synergies." Si synergies il y a, il faudra en tout cas éviter de trop tarder : les LMP1 ne sont pour l'instant acceptées dans la catégorie Hypercar que pour la saison 2021.

Alpine A480 LMP1

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