Les explications derrière l'asphalte décevant de Miami

Si les pilotes ont apprécié le tracé de Miami (à part la chicane), c'est sa surface qui a fait parler et qui a été au centre des critiques.

Les officiels, dont le directeur de course Niels Wittich et Bernd Maylander, inspectent la piste

Photo de: Carl Bingham / Motorsport Images

La surface unique de Miami, tellement mise en avant par les architectes du circuit, n'a pas fait l'unanimité parmi les pilotes, certains affirmant que le Grand Prix n'avait pas tenu ses promesses de spectacle à cause d'une piste si sale hors trajectoire qu'ils ne pouvaient pas se risquer à dépasser. Mais alors que les choses étaient loin d'être idéales et que des améliorations seront sans aucun doute mises en places pour le retour de la F1 en 2023, la course n'a pas été aussi mauvaise que certains pilotes (comme Sergio Pérez) l'avaient craint.

Par exemple, lors de la parade des pilotes, Fernando Alonso avait remarqué que l'adhérence à l'extérieur du virage 1 était bien plus importante qu'à l'intérieur, ce qui l'a incité à tenter une manœuvre au départ. Plus tard, Charles Leclerc a été surpris par le fait que Max Verstappen ait pu freiner si tard au même endroit, lorsque le pilote Red Bull a pris la tête. Le patron de Mercedes, Toto Wolff, estime que la nature de la surface ainsi que certaines réparations réalisées au cours du week-end avaient été bonnes pour le spectacle.

"Même le changement de tarmac, dans le virage 17 par exemple, a donné des dépassements", déclare-t-il. "Il était très difficile de freiner dans ce virage. Si vous perdiez la trajectoire, vous perdiez une position ou deux, et il est évident que les pilotes diront : 'Ce n'est pas optimal'. Mais pour la course et le divertissement, c'était génial. C'est exactement ce que ça devrait être. C'est presque comme un bac à graviers que vous ajoutez à l'intérieur pour rendre la course excitante. Tout compte fait, pour une première, je donnerais une note de neuf sur dix."

Un asphalte inhabituel pour la F1

Pourtant, les autres nouveaux circuits de F1, comme Djeddah, ont offert des surfaces qui ont produit une grande adhérence lors de leurs Grands Prix inauguraux. Il faut cependant faire attention aux comparaisons avec le tracé saoudien, car il s'agit d'une course de nuit qui se déroule dans des conditions plus fraîches, qui offrent automatiquement une bien meilleure adhérence. La température de la piste de Miami était l'une des plus élevées vues en F1, et les sensations pour les pilotes allaient donc forcément être différentes.

Le resurfaçage du virage 17, survenu entre le jeudi et le vendredi.

Le resurfaçage du virage 17, survenu entre le jeudi et le vendredi.

Mais pourquoi Miami n'a pas utilisé les mêmes matériaux qu'ailleurs pour sa construction ? D'autant que des travaux de resurfaçage ont été nécessaires avant même le début du week-end, soulevant de nouvelles questions quant aux matériaux utilisés. Les dégâts relevés ont été causés par la machine employée pour retirer les saletés de la surface : cette dernière a mal été réglée et a laissé tomber du liquide hydraulique sur la piste. Une erreur qui a provoqué la rupture de la surface lorsque les voitures ont roulé dessus pour la première fois, bien que cela n'ait aucun rapport avec le tracé en lui-même, puisque le résultat aurait été identique sur n'importe quelle autre piste où la même erreur aurait été commise.

La composition du revêtement de la piste de Miami est donc différente de celle des autres circuits au calendrier. Cependant, en raison de son emplacement, le Département des transports de Floride (FDOT) a mis en place des directives gouvernementales strictes qui imposent l'utilisation de matériaux précis (dont certains doivent être locaux) dans la composition de tout revêtement posé. Selon David Woodward, spécialiste des circuits qui a participé à la pose de l'asphalte à Miami, les conditions imposées au site étaient uniques.

"Nous devions utiliser des matériaux locaux, des agrégats locaux, nous devions faire appel à des entreprises d'asphalte locales, et nous devions travailler dans le respect des exigences du FDOT et de ce qu'il demande concernant ses matériaux locaux", déclare-t-il. "C'était donc un cahier des charges assez difficile à un certain niveau, car nous devions proposer quelque chose d'un peu différent d'un circuit de F1 classique. En temps normal, vous disposez d'une gamme beaucoup plus large de granulats et d'enrobés, alors qu'ici, nous étions coincés avec le matériau FDOT, et nous étions coincés avec le granulat local, donc c'était beaucoup plus difficile."

Le résultat final a été l'utilisation d'un agrégat de roche de chaux, combiné à un mélange de granit à 60% d'origine américaine provenant de l'état de Géorgie, pour essayer de trouver une surface adaptée à la F1.

Détails du virage 17 retravaillé.

Détails du virage 17 retravaillé.

Normalement, la roche calcaire n'est pas très utilisée sur les circuits de F1 car elle se décompose trop facilement et se polit. Elle n'offre donc ni une bonne adhérence, ni une dégradation correcte des pneus. Cependant, la roche calcaire du sud de la Floride présente des caractéristiques légèrement différentes. Sa forte teneur en silice s'apparente à une texture qui ressemble à de petits éclats de verre. Ainsi, lorsqu'elle s'use quand les voitures roulent dessus, elle expose davantage de cette silice qui offre une bonne adhérence.

La théorie était que cette combinaison unique fonctionnerait, les éclats de silice compensant ainsi les inconvénients classiques de l'utilisation de la roche calcaire. Cela explique pourquoi l'analyse de la surface effectuée par Pirelli au cours du week-end à Miami a montré que la piste était très lisse à l'échelle macro, mais rugueuse à l'échelle micro. Mario Isola, responsable F1 chez Pirelli, déclare : "En termes de chiffres, cet asphalte était différent des autres car la macro rugosité était très, très faible, mais la micro rugosité était, je crois, la plus élevée du championnat. Donc le niveau d'adhérence était bon dès le début avec beaucoup d'évolution de la piste."

Cependant, à mesure que la surface a été progressivement ébréchée par les voitures de F1, les petits fragments de pierre qui se détachaient devaient bien aller quelque part. Pirelli a constaté, au cours du week-end, que les pneus revenaient aux stands avec des pierres sur eux, ce qui signifie qu'il y en avait aussi beaucoup sur la piste et hors trajectoire.

"Les voitures enlèvent quelques petites pierres de l'asphalte", ajoute Isola. "Certaines se détachent, parce que nous avons trouvé des pierres sur les pneus, et celles-ci sont évidemment hors trajectoire. Et quand vous en sortez, vous perdez un peu d'adhérence." Les choses sont tout de même allées dans la bonne direction à mesure que les sessions défilaient. Ce qui était une situation assez extrême le vendredi, lorsque les premières pierres se sont détachées, s'est grandement amélioré au cours du week-end, notamment grâce à l'utilisation intensive d'une balayeuse de piste FOD Boss.

La voiture de sécurité en piste.

La voiture de sécurité en piste.

Ce qu'il est essentiel de comprendre maintenant, c'est comment la piste va évoluer après une année d'intempéries, sans être utilisée durant un an. Le phénomène des petits éclats qui se détachent disparaîtra-t-il au fil du temps, à mesure que la surface vieillira ? Ou est-ce quelque chose qui nécessitera une refonte totale de la surface ?

C'est une question qui ne sera tranchée que dans le cadre de l'analyse d'après course du Grand Prix de Miami. Mais il est clair que les responsables sont au courant de la situation et ont promis de faire tout ce qu'il faut pour que la course soit aussi bonne que possible en 2023.

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