Senna - Sao Paulo contre Rio

Tout au long de la seconde quinzaine d'avril, ToileF1 vous propose de vous plonger progressivement dans l'univers d'Ayrton Senna sous de multiples facettes. C'est à travers de nombreux prismes de son caractère ou ce qu'il représentait et représente encore aujourd'hui que nous avons souhaité commémorer les 20 ans de sa disparition, plutôt que de vous proposer un énième classement de ses meilleures courses ou des colonnes interminables sur sa relation avec notre Quadruple Champion du Monde français.

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Si le principal rival de Senna était et restera Alain Prost, Nelson Piquet n'était pas en reste, bien qu'il s'agissait d'une rivalité plus psychologique que sur le plan du pilotage. Également triple Champion du Monde brésilien issu d'une famille avantagée – son père fut un temps ministre de la santé au gouvernement – Piquet ne venait cependant pas du même coin du Brésil que Senna. L'un était un pauliste, de Sao Paulo; l'autre un carioca, de Rio, et les deux régions ne cherchaient pas à arrondir les angles! Piquet non plus...

Leur première rencontre se produisit avant le passage en F1 de Senna et a défini la suite de leur relation : alors qu'on présenta Senna à Piquet en 1982 à Zolder, le second ignora le premier. Senna se jura alors de battre son compatriote un jour sur la piste. Ce qu'il aurait pu faire à machine égale en 1984 chez Brabham pour ses débuts, mais Piquet s'y opposa discrètement, ne désirant pas une opposition interne. Le temps de récupérer une monoplace capable de rivaliser avec celle de Piquet, et Senna réussit à battre ce denier à l'occasion, bien que la fragilité de la Lotus l'empêcha de viser le titre jusqu'au bout en 1986 et 1987.

Piquet remporta son troisième et dernier titre cette année-là après que Nigel Mansell se soit brisé le dos en essais à Suzuka. Le flamboyant carioca sentait que l'avenir allait être davantage favorable à Senna, et le public ne s'y trompait pas, si bien que même à Rio, on commença à prendre parti pour le nouveau pilote McLaren. Lotus entamait alors sa descente aux enfers, et Piquet n'avait pas le caractère jusqu’au-boutiste de Senna pour l'enrayer. Par contre, il savait que ce dernier n'avait pas la même force psychologique sans un volant en main. D'où de perfides allusions sur... la sexualité de Senna! Après avoir insulté la femme de Mansell, Piquet montrait là-encore sa grande politesse envers ses adversaires !

Senna répondit à peine, se contentant de briller sur la piste, d'autant que Piquet n'eut que trop rarement l'occasion de faire de même, en dehors de trois dernières victoires sur Benetton en 1990 et 1991. Ironie du sort, c'est lui qui prit indirectement le parti de Senna lorsqu'il demanda, lors du briefing des pilotes de Suzuka en 1990, que l'on régule l'utilisation de l'échappatoire de la dernière chicane en cas d'erreur, ce qui avait valu la disqualification de Senna douze mois plus tôt. De dépit, Senna quitta le briefing, et la suite est connue.

Piquet quitta la F1 fin 1991 lorsqu'il se rendit compte que son temps était venu après qu'un débutant nommé Michael Schumacher ne le domine régulièrement. Son expérience aux États-Unis tourna court : un accident aux essais des 500 Miles d'Indianapolis lui broya le pied. Il courut à l'occasion malgré tout après cela, et n'assista pas aux funérailles de Senna. A ceux qui lui ont reproché cette absence, il eut une réponse bien plus réfléchie que ses envolées lyriques passées :

"A tort ou à raison, je n'ai jamais été proche d'Ayrton. Il aurait été indécent de ma part de mêler ma peine à celle d'hommes ou de femmes qui l'avaient vraiment aimé".