Technique - Les secrets de la nouvelle Ferrari

La Scuderia Ferrari place beaucoup d’espoir en la SF16-H. Mais la nouvelle monoplace italienne a-t-elle ce qu’il faut pour battre Mercedes ?

Ferrari SF16-H, vue de coupe

Giorgio Piola

Les analyses techniques F1 de Giorgio Piola

Éminent expert technique de Formule 1, Giorgio Piola suit les Grands Prix depuis les années 1960. Sur Motorsport.com, ses analyses et illustrations se penchent sur toutes les nouveautés aperçues en F1 au fil des Grands Prix.

Ferrari multiplie les changements depuis quelques temps et de nouveaux protagonistes tiennent maintenant les rênes de l’écurie pour la mener vers la lutte pour le titre.

Arrivé en vue de la saison 2015, le quadruple Champion du monde Sébastien Vettel a indéniablement donné un coup de fouet à l’équipe, mais il ne faut pas sous-estimer l’impact de ses patrons, Maurizio Arrivabene et Sergio Marchionne.

La passion d’Arrivabene ne fait aucun doute : il vit pour le cheval cabré et rien ne le rendrait plus heureux que d’offrir à la Scuderia ce qu’elle attend depuis neuf ans : un titre mondial. Et derrière les murs de l’usine, l’équipe technique de James Allison progresse après des changements d’infrastructures qui mettent toujours du temps à porter leurs fruits.

Des problèmes à régler

Les problèmes actuels de Ferrari sont en train d’être résolus, et même s’ils ne seront peut-être pas en mesure de se battre pour la victoire à chaque course, ils seront probablement bien plus proches que par le passé.

La Scuderia a fait des progrès significatifs au niveau de l’unité de puissance en 2015 et a réduit l’écart sur Mercedes en termes de performance, notamment grâce à la résolution des problèmes rencontrés en 2014. Cependant, la performance apportée par la collaboration avec le partenaire de longue date qu’est Shell ne peut être ignorée non plus.

Ayant perdu du terrain sur le rival Petronas depuis l’arrivée de la formule hybride, Shell a travaillé sans relâche pour remonter la pente avec Ferrari. Les informations collectées en WEC, où la technologie est très similaire, leur a également apporté un feedback crucial pour réduire cet écart.

Tout le monde sait que les monoplaces présentées en début de saison sont rarement représentatives de celles qui seront en piste lors des essais, sans parler du moment où elles prennent la piste à Melbourne.

Ceci étant dit, certaines particularités en disent parfois long sur la philosophie adoptée par les ingénieurs. Dans le cas de Ferrari, on peut penser à la suspension avant de la SF16-H.

 

Comparaison entre la Ferrari SF16-H et la SF15-T
Comparaison entre la Ferrari SF16-H et la SF15-T

Photo by: Giorgio Piola

Suspensions - Des tirants aux poussoirs

Ferrari a conservé la suspension à tirants pendant quatre saisons mais a finalement décidé que ses avantages n’en valaient pas les inconvénients.

Du point de vue du pilote, tirants et poussoirs offrent une performance cinématique quasiment identique. Seule l’influence sur la déformation du pneu peut changer. En préconisant les tirants, Ferrari espérait augmenter la charge sur les pneus avant pour qu’ils montent plus vite en température et qu’ils la maintiennent plus longtemps.

Mais l’évolution des composés Pirelli et de leur construction au fil des saisons joue maintenant en défaveur des tirants. Sans les exigences mécaniques et le problème du poids supplémentaire nécessaire pour accroître la rigidité l’an dernier, les gains aérodynamiques ne l’emportent plus sur d’autres considérations, d’où le choix d’une suspension avant à poussoirs.

 

Comparaison entre la Ferrari SF16-H et la SF15-T
Comparaison entre la Ferrari SF16-H et la SF15-T

Photo by: Giorgio Piola

Nez court

La SF16-H affiche aussi un museau plus conventionnel que celui de la ST15-T : Ferrari est la seule équipe à avoir fini la saison 2015 avec un museau long. Sur la monoplace 2016, le bout du museau est peu avancé de façon à faire fonctionner la section neutre différemment de la voiture précédente.

Les mâts du museau sont fixés aussi loin vers l’arrière et sur les côtés que possible ; ainsi, le nouveau museau augmente le débit d’air qui peut circuler sous la voiture. Les ingénieurs ont par ailleurs travaillé très fort pour reculer et réduire la taille la pointe du museau.

L’aileron avant montré ici, quant à lui, n’a pas changé depuis la fin de la dernière campagne et sera révisé sans le moindre doute pendant les essais hivernaux.

 

Détails des aubes directrices de la Ferrari SF16-H
Détails des aubes directrices de la Ferrari SF16-H

Photo by: Ferrari Media Center

Déflecteurs

Sous le museau, on devine par ailleurs la présence d’un déflecteur (en vert sur la photo). Encore une fois, il s’agit d’une pièce, déjà vue sur la dernière monoplace, qui évoluera sans aucun doute au cours de l’hiver pour maximiser le flux d’air apporté par le nez plus court.

Bien qu’on ne le voie pas sur les photos du lancement, Ferrari semble aussi avoir conservé son essieu avant soufflé, bien que celui-ci soit dissimulé sur les photos, le flux d’air étant dévié par l’essieu (en bleu) dans le but d’aider l’aileron avant à réduire la turbulence créée par les pneus dans l’air.

 

Détails du S-duct
Détails du S-duct

Photo by: Ferrari Media Center

Vers un S-Duct ?

À noter également qu’un élément assez large recouvre une partie de l’avant du châssis dont la forme elle-même a été modifiée, accroissant l’espace entre le plan de référence et la surface supérieure. Cet élément pourrait être utilisé simplement pour faire des réglages plus aisément, mais je pense que nous pourrions voir Ferrari introduire un S-Duct similaire à mes illustrations pré-essais.

Ferrari a apporté de nombreuses modifications à son unité de puissance, ainsi qu’à des pièces secondaires.

S’il est difficile de déterminer le nombre exact de radiateurs logés dans les pontons, on peut au moins affirmer que Ferrari a modifié sa tuyauterie en faveur d’une disposition plus conventionnelle que l’an dernier.

 

Comparaison entre la Ferrari 2015 et la Ferrari 2016
Comparaison entre la Ferrari 2015 et la Ferrari 2016

Photo by: Giorgio Piola

Refroidissement de l’unité de puissance

Cet effort pour rendre le système de refroidissement plus efficace a vraisemblablement libéré l’espace dans le V du moteur à combustion interne. Espace qu’occupent maintenant des trompettes d’admission intelligentes, un dispositif qui permet un contrôle beaucoup plus fin du mélange air/carburant, et donc améliore l’efficience et la performance.

L’efficience thermique est l’un des aspects les plus importants de la formule hybride. Décider comment refroidir les composants est crucial mais représente des compromis aérodynamiques.

 

Ferrari SF16-H
Ferrari SF16-H

Photo by: Ferrari Media Center

Pontons

L’ouverture des pontons semble avoir été élargie, ce qui augmente la capacité de refroidissement pour supporter la puissance moteur supérieure qui est attendue.

Ces mêmes pontons affichent d’ailleurs une ligne plus svelte, ramenée vers l’intérieur, avec des sorties d’air relevées pour permettre une meilleure circulation de l’air. La cause ? Le repositionnement du récupérateur d’énergie cinétique (MGU-K) qu’on retrouve à côté du moteur et non plus derrière.

À noter que cette disposition enlève la possibilité d’un démarreur embarqué. Alors que l’an dernier les pilotes Ferrari pouvaient relancer leur moteur en piste, il faudra l’aide d’un ingénieur et d’un démarreur externe en 2016.

La révision du MGU-K a des répercussions : il a fallu redessiner l’embrayage, la boîte de vitesses et la cellule de survie pour un package plus étroit.

 

Ferrari SF16-H
Ferrari SF16-H

Photo by: Giorgio Piola

Prise d'air

Cette année marque aussi un changement de philosophie dans le dessin de la prise d’air du moteur. Ferrari a en effet abandonné le trapèze qu’elle favorisait depuis 2012 au profit d’un U inversé qui aura un impact sur l’arrivée d’air sur le turbo.

 

Comparaison entre la Ferrari SF16-H et la SF15-T
Comparaison entre la Ferrari SF16-H et la SF15-T

Photo by: Giorgio Piola

Capot moteur

Sur le capot du moteur, on peut remarquer une ailette (en vert), similaire à celle déjà ajoutée à la SF15-T. Cette dernière, qu’on trouvait déjà sur la SF15-T, travaille avec une encoche dans le capot [1] pour maximiser la performance en éliminant les turbulences dans l’air qui voyage vers l’aileron arrière et en améliorant l’efficacité de ce dernier.

Le relief du capot moteur a lui aussi changé [2] pour compenser la suppression d’une sortie d’air chaud. Résultat, la nageoire de requin à l’arrière est plus courte.

Les cheminées [3] qui refroidissaient les pontons en longeant le cockpit comptent, elles, de nouvelles sorties qui permettent aux ingénieurs de régler le débit selon les caractéristiques de chaque circuit.

 

Options de design pour les échappements 2016
Options de design pour les échappements 2016

Photo by: Giorgio Piola

Wastegate

Pour 2016, il a été demandé aux motoristes de changer leur approche quant au bout des wastegates. En 2015, la ou les wastegate(s) devaient rejoindre l’échappement principal, mais la FIA a changé la réglementation pour augmenter le bruit des unités de puissance.

C’est pourquoi on aperçoit au moins un échappement de plus à l’arrière de chaque voiture ; Ferrari, par exemple, semble préférer l’option de deux wastegates. Les images du lancement semblent montrer un échappement à côté de l’échappement principal, ce qui laisse imaginer qu’il y en a un de l’autre côté.

Comme à l’avant, l’aileron arrière ressemble en tout point à la version aperçue en fin de saison 2015 sur la dernière monoplace. Prévoyez des changements de ce côté très prochainement.

Verdict

La SF16-H a déjà l’air d’une bonne voiture : les ingénieurs semblent avoir corrigé plusieurs des faiblesses de la SF15-T tout en essayant d’en tirer plus de performance.

Cependant, il est encore trop tôt pour s’avancer, mais nous saurons bientôt si les objectifs ambitieux déclarés à Maranello sont justifiés !

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