Pourquoi les décisions de Michael Masi laissent un goût amer

L'accident de Nicholas Latifi à la fin du Grand Prix d'Abu Dhabi a poussé Michael Masi, le directeur de course, à faire appel à la voiture de sécurité. Et les décisions suivantes de l'Australien ont été très mal accueillies.

La voiture de sécurité, Lewis Hamilton, Mercedes W12, Lando Norris, McLaren MCL35M

Photo de: Jerry Andre / Motorsport Images

De nombreux fans ne sont pas parvenus à cacher leur colère et leur frustration face à une gestion calamiteuse du Grand Prix d'Abu Dhabi, au cours duquel les deux titres mondiaux ont été attribués. Sur les réseaux sociaux, les accusations de trucage adressées à la FIA dans la mise en place d'un finish hollywoodien étaient omniprésentes. Certes, il n'est pas rare de croiser des fans agacés mais cette fois-ci, ces avis ont aussi été partagés par les propres acteurs de la F1...

Ainsi, George Russell a lourdement critiqué la gestion du Safety Car en toute fin de course, ce qui a permis à Max Verstappen de remporter la victoire et le titre. "Max est un pilote absolument fantastique qui a eu une saison incroyable", a-t-il écrit sur son compte Twitter. "Je n'ai que du respect pour lui mais ce qui vient de se passer est absolument inacceptable. Je n'arrive pas à croire ce qui vient de se passer."

Un Safety Car qui fait débat

La controverse porte sur la manière dont Michael Masi, le directeur de course, a géré la période de neutralisation faisant suite à l'accident de Nicholas Latifi, à cinq tours de l'arrivée. La procédure avait pourtant bien débuté, les pilotes s'étaient regroupés derrière la voiture de sécurité pendant que les commissaires faisaient de leur mieux pour retirer la monoplace endommagée du Canadien le plus rapidement possible.

Toutefois, la situation a dégénéré au moment où Masi a donné le message suivant : "Les voitures retardataires ne seront pas autorisées à dépasser". En d'autres termes, Max Verstappen devait prendre un tour à cinq pilotes avant de porter une attaque sur le leader Lewis Hamilton pour tenter de remporter son premier titre de Champion du monde.

Mais peu de temps après, Christian Horner, le patron de Red Bull, a communiqué avec le directeur de course pour le supplier de faire disparaître les retardataires. Le règlement n'a pas été respecté car, dans l'avant-dernier tour de course, seuls les hommes circulant entre Hamilton et Verstappen ont été autorisés à se dédoubler. Et pour aggraver la confusion, Masi a choisi de relancer la course à la fin de ce même tour et non à la fin du tour suivant comme le règlement l'impose. Avec Verstappen en pneus tendres et Hamilton sur des durs très usés, il était évident que le pilote Red Bull avait un net avantage.

La volte-face sur la gestion des retardataires, la décision de ne faire avancer qu'un nombre choisi et la relance de course précipitée : ces trois moments ont placé Michael Masi, la FIA et la F1 face à tsunami de critiques légitimes. En fin de compte, Masi a pris des airs d'autorité suprême en décidant de l'issue du championnat car, même si cela a été exacerbé par la différence dans l'état des pneus, tout s'est joué sur la décision de reprendre la course dans le dernier tour.

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Ce qui pose problème, c'est la façon dont le règlement a été ignoré pour mettre en place un certain scénario. Le premier message indiquant que les retardataires ne pouvaient pas dépasser était anormal car la procédure standard est de ne rien annoncer sauf si les retardataires sont autorisés à dépasser. Ensuite, comme Mercedes l'a fait valoir lors de son audience, l'Article 48.12 du Règlement Sportif énonce que la relance de la course ne peut se faire qu'au tour suivant celui où les retardataires ont été invités à se dédoubler. Donc, à Abu Dhabi, la course aurait dû se terminer sous Safety Car.

Sur ce point, les règles sont on ne peut plus claires et la FIA a reconnu qu'elles n'avaient pas été appliquées "dans leur intégralité". Cependant, les commissaires ont jugé que d'autres règles les avaient remplacées et qu'il n'y avait donc eu aucune infraction. La FIA s'est appuyée sur l'Article 15.3, stipulant que le directeur de course avait une "autorité prépondérante" sur la voiture de sécurité. Par conséquent, lorsque Michael Masi a décidé que l'Aston Martin devait rentrer au stand, sa parole ne pouvait pas être remise en question.

Jurisprudence

Cette interprétation, celle de certaines règles qui supplantent d'autres, et le pouvoir absolu du directeur de course sur la voiture de sécurité et sur d'autres aspects de la course pourraient créer un précédent bien inquiétant.

Par exemple, l'Article 15.3 donne à Masi le contrôle de la procédure de départ. Est-ce que cela signifie que l'Australien peut, s'il le désire, donner le départ de la course après trois feux rouges au lieu des cinq règlementaires ? Avec une telle carte blanche, les résultats d'un Grand Prix peuvent être influencés par les décisions de l'arbitre d'une manière qui n'est pas prévue par le règlement.

Les équipes et les pilotes sont dans l'obligation de suivre ce règlement. Mais si les règles ne comptent pas parce que le directeur de course a le pouvoir de les contourner, est-ce juste ? Tout au long de l'année, la FIA a pris d'étranges décisions, du laissez-faire pour des gestes antisportifs aux pénalités difficilement justifiables, ce qui a plongé le paddock dans le malaise le plus profond.

Le drapeau rouge, une solution ?

Au final, Michael Masi voulait simplement que la course reprenne ses droits. Pendant l'audience de Mercedes, l'Australien a indiqué "qu'il avait été convenu depuis longtemps par toutes les équipes que, dans la mesure du possible, il était hautement souhaitable que la course se termine sous 'vert'", c'est-à-dire sans la présence d'une voiture de sécurité ou d'un Virtual Safety Car.

Cet argument s'entend, toutefois ce qui n'a pas beaucoup de sens, c'est le pétrin dans lequel s'est mis Masi pour reprendre la course. Si son souhait de finir "sous vert" était si grand, sa réalisation aurait pu se faire d'une manière beaucoup plus juste et transparente via le déploiement du drapeau rouge.

En effet, une interruption de la course et la tenue d'un second départ aurait été beaucoup plus judicieux. Après tout, c'est ce qui s'est passé en Azerbaïdjan quelques mois plus tôt, à la suite de la crevaison de Verstappen. Si tel avait été le cas à Abu Dhabi ce dimanche, le Néerlandais et Hamilton auraient été placés sur un pied d'égalité avec des pneus neufs pour tout le monde et un départ arrêté. Le spectacle aurait été grandiose et, qu'importe l'issue, la parfaite conclusion d'une saison folle.

Au lieu de ça, la F1 se dirige tout droit vers un hiver rude au cours duquel Mercedes pourrait faire appel de la décision de la FIA et se tourner vers le Tribunal arbitral du sport. Ce qui devait être le plus beau jour de l'année a, de loin, été le pire. Le public allant même jusqu'à parler de trucage.

Cette issue est également profondément injuste pour un pilote, et il ne s'agit pas de Hamilton. Avec dix victoires et de nombreuses performances admirables, Verstappen a prouvé qu'il avait l'étoffe d'un Champion du monde. Son titre 2021, il l'a gagné sur la piste. Mais à cause des actions du directeur de course, certains continueront de penser le contraire. 

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