Analyse
Formule 1 GP des Pays-Bas

Départs ratés chez McLaren : la quête complexe d'une solution

McLaren cherche à résoudre ses problèmes lors des départs, mais il s'agit d'un sujet devenu très compliqué dans la Formule 1 d'aujourd'hui.

Max Verstappen, Red Bull Racing RB20, Lando Norris, McLaren MCL38 et Oscar Piastri, McLaren MCL38 au départ

Lando Norris est parvenu à reprendre la main malgré un envol raté au Grand Prix des Pays-Bas mais McLaren sait qu'il est nécessaire d'améliorer ce mal récurrent. À Zandvoort, Oscar Piastri a rencontré le même souci, se retrouvant derrière George Russell et perdant ainsi ses chances de podium par la suite, et peut-être même de devancer Max Verstappen.

"Si nous n'avions pas perdu la position avec Oscar, je pense que ça aurait été une course différente", note d'ailleurs Andrea Stella, directeur de l'écurie anglaise. "Il avait le rythme pour battre Max. Je dirais donc que c'est une grosse occasion manquée. Il y a une thématique plus large autour des départs, et c'est assurément une priorité pour la suite chez McLaren."

Ces ennuis à l'extinction des feux sont survenus à Zandvoort dans la continuité de ce qu'avait déjà vécu Norris auparavant, lui coûtant beaucoup dans sa lutte face à Red Bull et Verstappen. Au Grand Prix d'Espagne, il avait d'abord pris un bon envol depuis la pole position mais avait souffert de patinage dans ce que l'on appelle la seconde phase d'accélération, permettant à Verstappen de reprendre l'avantage à l'intérieur.

Le départ du GP des Pays-Bas, dimanche dernier.

Le départ du GP des Pays-Bas, dimanche dernier.

Photo de: Sam Bloxham / Motorsport Images

Au Grand Prix de Hongrie, le scénario était quasiment identique face à Piastri. Norris avait encore une fois pris une bonne impulsion avant d'en perdre le bénéfice dans la seconde phase, permettant à son coéquipier de prendre la tête au premier virage.

Et Zandvoort est donc venu s'ajouter à la liste, touchant cette fois-ci les deux monoplaces. Alors que Norris était jusqu'ici parfois pointé du doigt, ce qui s'est passé aux Pays-Bas a peut-être mis en lumière la part de l'écurie dans l'optimisation des départs. Car il y a énormément de facteurs techniques complexes en jeu. 

Entre les mains du pilote...

L'époque où les pilotes disposaient de ce qui était un "launch control", en relâchant simplement l'embrayage pour que l'électronique prenne la main sur la gestion du patinage, est révolue depuis longtemps. Ces dix dernières années, la FIA a pris plusieurs mesures pour faire en sorte que les pilotes aient une plus grande influence sur les départs, au lieu des ingénieurs.

Aujourd'hui, il existe des définitions strictes de la manière dont les embrayages – et même les palettes d'embrayage – peuvent être cartographiés et agencés pour garantir que les départs restent sous le contrôle du pilote. En plus de rendre obligatoire pour chaque pilote l'utilisation d'une palette spécifique, les signaux d'embrayage utilisés par l'ECU standard sont étroitement surveillés par la FIA afin de limiter toute cartographie avantageuse.

Le volant VCARB de Daniel Ricciardo.

Le volant VCARB de Daniel Ricciardo.

Photo de: Mark Sutton / Motorsport Images

Si une équipe souhaite utiliser deux palettes d'embrayage sur le volant, elles doivent désormais être identiques pour ce qui est de la forme, du mouvement et de la cartographie. Il peut être demandé aux pilotes de démontrer que ces deux palettes fonctionnent exactement de la même manière. Il est également interdit aux équipes de placer des points de référence à proximité des palettes d'embrayage afin d'aider les pilotes à trouver une position récurrente, avec une zone d'exclusion de 50 mm.

En outre, la palette doit fonctionner de manière linéaire avec l'embrayage, ce qui signifie que les actions du pilote doivent être entièrement représentatives de l'engagement de l'embrayage. Ainsi il n'est pas possible d'utiliser une cartographie intelligente permettant d'obtenir un large point de patinage, comme c'était le cas avant 2017.

"Il suffisait de relâcher entre 10 et 80%", explique Kevin Magnussen quant à cet ancien procédé. "Quelque part dans cet intervalle, il y avait une cartographie qui était réglée en fonction de l'adhérence, des pneus et de la charge de carburant. Donc avant, le départ dépendait à 100% des ingénieurs. Mais maintenant, c'est à nous de jouer."

La clé pour effectuer le meilleur envol est de réussir les trois éléments distincts du départ. Il y a d'abord la phase initiale de départ, au cours de laquelle l'embrayage est complètement engagé et le régime moteur fixé à un niveau prédéterminé : le pilote réagit à l'extinction des feux pour atteindre le point de patinage qui permet à la voiture de se mettre en mouvement.

Le départ du GP de Hongrie 2024.

Le départ du GP de Hongrie 2024.

Photo de: Steve Etherington / Motorsport Images

Ensuite vient la seconde phase, où l'embrayage est progressivement relâché au fur et à mesure que la voiture accélère : pas trop vite pour ne pas faire patiner les roues, ni trop lentement pour ne pas caler. Une différence de quelques millimètres dans le relâchement de la pédale d'embrayage peut coûter une position sur la piste. Enfin, il y a l'accélération finale : l'embrayage a été complètement relâché et le pilote doit optimiser son accélération et ses changements de rapport.

L'analyse des problèmes de Norris au départ montre qu'ils se produisent généralement lors de la deuxième phase. L'envol initial et le temps de réaction sont bons, mais la transition vers l'accélération finale se passe mal.

C'était visiblement le cas à Zandvoort puisque selon les données officielles de la F1, Norris et Verstappen ont eu le même temps de réaction de 0,28 seconde lorsque les feux se sont éteints. Cependant, Verstappen a atteint les 200 km/h en 5"23 tandis qu'il a fallu 5"64 à Norris, qui a subi du patinage.

Il n'est toutefois pas simple de déterminer ce qui ne va pas, car un problème lors d'une phase peut avoir des répercussions sur une autre.

"Je me souviens qu'en Hongrie, il y avait probablement un peu trop de patinage lors des deux premières secondes", explique Andrea Stella. "Par conséquent, le passage de rapports a été affecté et il était lent, ce qui a fait perdre la dynamique. C'était donc une combinaison entre le patinage de la voiture et le fait que le pilote aurait pu mieux contrôler ce patinage, mais aussi que nos réglages n'étaient probablement pas les meilleurs pour ces conditions."

Lando Norris et son ingénieur Will Joseph.

Lando Norris et son ingénieur Will Joseph.

Photo de: Alastair Staley / Motorsport Images

La quête du départ parfait

Si McLaren souffre de patinage lors des départs, il serait trop simpliste de dire que Norris doit être plus doux avec l'accélérateur, car il n'y a pas que le niveau de pression de la pédale qui doit être parfait pour éviter ce phénomène. De nombreux facteurs entrent en jeu : la manière de relâcher l'embrayage, son point de patinage, sa température, son usure, le niveau d'accélération, les caractéristiques du couple moteur, la température des pneus et le niveau d'adhérence offert par la piste.

Ces éléments et leur influence ne sont jamais identiques, et ce qui fonctionne dans les circonstances d'une course ne sera pas forcément vrai pour une autre. Les pilotes et les ingénieurs tentent constamment de trouver le bon équilibre qui fonctionnera, sachant que les essais de départ sont limités lors d'un week-end de Grand Prix.

Il y a quelques années, Valtteri Bottas avait donné un aperçu très intéressant de la variabilité d'un départ à l'autre et de ce qui pouvait mal tourner.

"On peut avoir échoué à faire monter suffisamment les pneus arrière en température dans le tour de formation, on peut avoir du patinage, ou l'embrayage peut se comporter légèrement différemment en fonction des températures", décrivait-il. "Quand on fait un essai de départ pour le tour de formation, ça fait monter la température, et parfois ça peut mordre un peu plus, donc ça dépend de l'embrayage. Il ne se comporte pas toujours à 100% de la même manière."

"On peut aussi faire soi-même une erreur de jugement. On pense avoir moins d'adhérence qu'il n'y en a réellement sur la grille, ou l'inverse. Il y a de nombreuses choses qui peuvent mal se passer. Il faut essayer de rester simple : sentir le grip, analyser le tour de formation et deviner le niveau d'adhérence au départ."

Le peloton après le départ du GP des Pays-Bas.

Le peloton après le départ du GP des Pays-Bas.

Photo de: Sam Bloxham / Motorsport Images

Trouver le remède

Réussir de meilleurs départs est finalement une question de régularité. Les écuries doivent apprendre de ce qui s'est mal passé pour utiliser ces connaissances afin de progresser. C'est le processus dans lequel est engagé McLaren.

Il y a aussi un élément qui accentue le contraste entre les bons et les mauvais départs sur la grille. Ce qui serait un départ correct en milieu de peloton peut apparaître comme très mauvais depuis la pole position quand on le compare à une machine parfaitement huilée comme la Red Bull de Verstappen.

"L'optimisation des départs est un processus qui passe par une revue constante de ce que l'on fait à chaque essai, que ce soit les départs sur la grille ou ceux des Grands Prix précédents", précise Andrea Stella. "C'est une combinaison de l'exécution du pilote et de ce que les ingénieurs peuvent faire pour aider la préparation des pneus, régler l'embrayage, contrôler l'accélérateur. Le travail d'équipe joue un rôle important, et c'est ça qui améliore les choses progressivement."

"Ce n'est pas comme s'il y avait de bons réglages, une bonne position de départ et c'est tout. Il faut constamment se remettre en question et essayer de s'améliorer. Lors de certains des Grands Prix précédents, nous avons laissé un peu de performance en route, donc il y a quelques points que nous devons ajuster."

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