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Comment Schumacher a façonné l'équipement moderne des pilotes

Vous vous méprenez si vous pensez que les avancées technologiques en Formule 1 se sont limitées aux voitures ces dernières années. Ce n'est pas seulement ce dans quoi les pilotes s'assoient qui évolue, mais aussi ce qu'ils portent.

Michael Schumacher, Mercedes AMG F1 lors de la parade des pilotes

Photo de: XPB Images

Les combinaisons, les bottines et les gants des pilotes peuvent sembler similaires à ce qu'ils étaient par le passé, mais si vous regardez de plus près, vous verrez que les choses ont nettement évolué. Comparez la manière dont Jacques Villeneuve avait opté pour la combinaison la plus large possible, afin de trouver un confort optimal, avec les coupes actuelles bien plus étroites.

Alors que les pilotes pouvaient voir par le passé leurs combinaisons et bottines comme des objets peu pratiques mais nécessaires, ils les traitent désormais avec la même attention que les autres éléments de la voiture, et croient même que des avantages en performance peuvent être trouvés s'ils font tous les efforts possibles.

Par exemple, chez Renault en 2019, tandis que Daniel Ricciardo se satisfaisait de bottines traditionnelles, son coéquipier Nico Hülkenberg a senti qu'il avait la possibilité de gagner du poids dans ce domaine et a cherché un concept plus léger avec une semelle unique d'une épaisseur de 1,5 mm.

"Pour être honnête, c'est pour gagner du poids", avait-t-il justifié auprès de Motorsport.com au moment d'expliquer les raisons d'un concept si extrême. "C'est le principal objectif. L'espace pour les pieds est assez serré aussi [dans la monoplace], donc si elles ont une épaisseur importante, comme pour la semelle, ce n'est pas très confortable et je n'ai pas beaucoup de place pour bouger, même si c'est plus lourd. C'était tout d'abord pour gagner du poids, et je m'y suis habitué. Mais j'essaie de les rendre toujours plus légères, c'est l'objectif. On a l'impression que c'est une chaussette."

Bien que l'économie de poids grâce à sa semelle spéciale fût minime dans une voiture qui pesait 660 kg sans son pilote, tout s'additionne dans un sport où les gains sont marginaux. Et 10 grammes gagnés permettent d'ajouter 10 grammes de lest à un autre endroit. C'est pourquoi les progrès technologiques des combinaisons, en termes de matériaux utilisés, de processus d'application des sponsors, et de style allant vers quelque chose de plus étroit pour réduire la quantité de matière, ont permis de faire passer le poids de presque 1,3 kg à 700 ou 800 grammes aujourd'hui, selon la taille du pilote.

Pour remettre cela dans son contexte, si 10 kg valent trois dixièmes de seconde au tour, un gain de 500 grammes sur la combinaison vaut 0"015. En F1, cela peut faire gagner une place sur la grille de départ. L'attention au détail de Ricciardo est typique de la nouvelle génération de pilotes, qui étudient chaque élément qui les entoure pour trouver les gains les plus infimes, qu'il s'agisse de poids ou de confort. Par exemple, George Russell préfère que les coutures de ses gants soient à l'intérieur de la main, afin que le grip sur le volant soit meilleur. Sergio Pérez aime que ses gants soient courts au poignet pour éviter qu'ils ne gênent ses manches de combinaison.

Un pilote a un jour émis l'étrange requête d'avoir ses sous-vêtements en une pièce, à la manière d'un pyjama de bébé, plutôt que de les avoir en plusieurs parties. Ce n'était pas une question de mode, et il se dit que ça a été demandé car il oubliait sans cesse d'apporter ses chaussettes ! Mais il n'est pas étonnant d'entendre de la part du fournisseur d'Alpinestars, que l'une des grandes révélations pour l'entreprise a été la manière dont Michael Schumacher a fait progresser les choses dans ce domaine lorsqu'il travaillait avec eux.

"Le fait est que les pilotes vous disent ce qu'ils n'aiment pas, mais ils ne sont pas capables de vous dire ce qu'ils aiment", a expliqué Chiara Consarino, responsable du développement produit d'Alpinestars. "Il y en a très peu qui sont très bons pour cela. Mais Michael Schumacher était, sur l'aspect technique, le meilleur avec qui j'aie travaillé. C'était l'un des plus actifs. Il se concentrait sur les détails et a été l'un des premiers à penser à réduire la quantité de matière en faisant une coupe étroite. Nous avons fait des combinaisons pour lui lorsqu'il a fait des essais privés avant la Race of Champions en 2008 et 2009, et elles étaient très étroites, là où les autres portaient tous des combinaisons larges."

Michael Schumacher, Mercedes

Schumacher s'est associé officiellement avec Alpinestars en F1 pour la première fois lorsqu'il a fait son retour chez Mercedes en 2010. Cependant, il connaissait l'entreprise grâce à ses essais en moto, juste après sa première retraite. Il a appris des leçons de cette période, avec des combinaisons bien plus ajustées, et y a vu une opportunité d'améliorer son équipement en F1. Un passage vers une combinaison plus étroite, qui pèse moins, est devenu possible grâce à l'utilisation de pièces extensibles et en préformant la combinaison. Le directeur commercial d'Alpinestars à l'époque, Jeremy Appleton, gardait un œil sur les développements en MotoGP et en F1, et se rappelle d'une conversation qui démontrait l'attention au détail de Schumacher.

"Il était très concentré sur l'accroche offerte par ses gants, donc on a beaucoup travaillé avec lui là-dessus", racontait Appleton au sujet de la recherche du design des grips en silicone et en cuir sur la paume. "Il voulait aussi que les coutures sur une partie du gant soient changées car c'était l'endroit de la main qui était en contact avec le volant. Il était impliqué également avec les technologies d'égalisation du grip sur lesquelles nous travaillions. Particulièrement sous la pluie, quand les gants sont humides, vous pouvez avoir un excellent grip à l'extérieur sur le volant, mais la main peut glisser dans le gant. Nous avons donc trouvé un moyen d'égaliser le grip afin de nous assurer que la main ne bougeait absolument pas sur le volant."

Bien que Schumacher ait lancé quelques tendances, d'autres pilotes se sont également démarqués depuis, avec leur attention sur les plus petits détails. C'est le cas des bottines de Ricciardo, par exemple, mais aussi de Fernando Alonso, qui avait impressionné les employés d'Alpinestars avec le sérieux de son approche dans ce domaine. L'Espagnol avait surtout travaillé sur la réduction du poids des bottines en passant des lacets traditionnels au Velcro plus moderne, utilisé par la plupart des pilotes aujourd'hui.

"Fernando était très exigeant. Il est très attentif au détail et il sait ce qu'il veut. Fernando a donné une indication claire sur la position que devaient occuper les coutures de ses sous-vêtements, car il sentait qu'elles touchaient ses clavicules, et [elles le gênaient] aussi sur les manches", poursuivait Chiara Consarino. Le travail d'Alpinestars avec les meilleurs pilotes de F1 a été fascinant, mais les hommes qui s'installent dans le cockpit sont également inspirés par la possibilité de donner leurs retours.

"Je n'ai jamais été trop tatillon, car au final je fais avec ce que j'ai", ajoutait Ricciardo. "Mais quand vous avez [un fournisseur] comme Alpinestars qui donne autant d'attention, vous pouvez vous permettre d'être un peu tatillon et de faire les choses à votre manière. J'ai apporté des changements à ma combinaison par exemple, comme certaines lignes de couture qui me rentraient dans les hanches, et j'ai passé un peu de temps sur les bottes. Je pense qu'ils m'ont forcé à chercher les moindres détails car ils cherchent toujours à aider, et ce n'est pas une mauvaise chose."

Travailler avec les pilotes a également permis à la marque d'équipement de prendre conscience de l'importance de leurs besoins, ainsi que de la manière de les aider, comme l'explique Consarino : "Quand j'ai commencé à travailler ici, je me demandais comment une simple couture pouvait être importante pour eux. Ça ne fait que trois millimètres. Mais quand je suis allé sur une course, j'ai compris cela, et [j'ai réalisé] que chaque détail compte. Quand ils courent à 300 km/h, il faut que rien ne les gêne."

La bottine de Daniel Ricciardo, Renault F1 Team

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