Comment la relation Alonso/Hamilton a "explosé" en 2007
La rivalité entre Fernando Alonso et Lewis Hamilton demeure l'une des plus marquantes de l'Histoire de la Formule 1. Pilote d'essais McLaren à l'époque, Pedro de la Rosa raconte.
Lewis Hamilton, McLaren MP4-22, devant Fernando Alonso, McLaren MP4-22, à la sortie des stands
Steven Tee / Motorsport Images
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L'écurie McLaren s'attendait-elle à ce qu'associer Fernando Alonso à Lewis Hamilton crée un cocktail explosif pour la saison 2007 de Formule 1 ? Probablement pas. Dans un contexte tendu lié à l'affaire d'espionnage qui a vu l'équipe britannique être exclue du championnat des constructeurs, la lutte pour le titre entre Alonso et Hamilton a été fratricide, jusqu'à la perte du titre des pilotes pour un petit point face à Kimi Räikkönen, pilote Ferrari.
C'est dès décembre 2005, après son premier sacre avec Renault, qu'Alonso avait décidé de signer chez McLaren – dont la MP4-20 avait été diablement rapide cette année-là – pour 2007. Sans doute s'attendait-il à être un indiscutable numéro 1, surtout lorsque l'équipe a choisi un rookie pour l'épauler, mais Lewis Hamilton n'était pas n'importe quel rookie et s'est immédiatement imposé comme candidat au titre en commençant sa carrière par une série époustouflante de neuf podiums consécutifs.
Des premières tensions sont apparues dès le Grand Prix de Monaco, alors que Hamilton était déjà en tête du championnat ; McLaren a décidé de geler les positions alors que le jeune Britannique rattrapait son aîné, ce qui avait d'ailleurs valu à l'écurie une enquête de la FIA, à une époque où les consignes d'équipe étaient interdites. Selon Pedro de la Rosa, il est clair que la situation avait été mal gérée.
"C'était une année terrifiante", relate De la Rosa dans le podcast Beyond The Grid. "En fait, quand j'y repense, les choses ont mal tourné bien avant le Spygate : le Spygate était la partie émergée de l'iceberg. Fernando avait gagné à Monaco à la régulière, et lors des 20 derniers tours de la course, il gérait la température des étriers de frein. Parce que nous avions un problème, à l'époque comme la plupart des équipes à Monaco dans les virages lents, où il était difficile de refroidir les étriers. Il était en tête, et il gérait simplement la situation. On voyait aux données qu'il avait un rythme de croisière ; c'était incroyable à quel point il freinait tôt à chaque point de freinage. Lewis le rattrapait extrêmement vite. Mais c'était comme si Fernando cachait son jeu."
"Je pense que l'équipe n'a jamais dit à Lewis qu'ils allaient finir la course dans ces positions-là. Lewis essayait de remporter ce Grand Prix de Monaco, puis c'est après la course que tout a dérapé. Car on a dit à Fernando que cette course aurait dû être gagnée par Lewis. On ne le lui a pas dit ainsi, mais ils ont suggéré que le gamin était plus rapide que lui, en somme. Et Fernando était complètement furieux, car si l'on regarde les données, si l'on comprend le sport auto, on sait que Fernando aurait pu aller deux secondes au tour plus vite. Mais Fernando est un pilote extrêmement intelligent, et il savait exactement comment gagner sans jamais compromettre les étriers, les freins, le moteur."
"Bref, je pense que c'était le début de la fin, malheureusement, car il s'est rendu compte qu'ils ne comprenaient pas ce qu'il faisait, à quel point son pilotage était intelligent. Après ça, tout a mal tourné. Lewis était extrêmement rapide, progressait et se renforçait. Et Fernando s'est rendu compte : 'Houston, nous avons un problème. Ce gars-là est plus rapide que je ne m'y attendais'."
Hamilton et Alonso ont continué à faire la course en tête du championnat, avec un léger avantage au Britannique, jusqu'à un Grand Prix de Hongrie qui allait faire basculer la relation des pilotes McLaren : en Q3, alors qu'il était en tête après la première salve de chronos, l'Espagnol a bloqué son coéquipier au stand pour l'empêcher d'effectuer un deuxième tour lancé. Hamilton était en colère, Alonso a été pénalisé de cinq places sur la grille : la hache de guerre était déterrée. Ils ont finalement tous deux perdu le titre avec un seul point de retard sur l'improbable Champion, Kimi Räikkönen pour Ferrari. C'était un véritable gâchis, d'après De la Rosa.
"J'étais surpris de la manière dont tout ça a explosé, malheureusement, car si l'on y repense, ce duo de pilotes est peut-être le meilleur de l'Histoire. Vraiment", insiste-t-il. Un meilleur duo qu'Alain Prost et Ayrton Senna chez McLaren ? "Oui. Je pense toujours que les nouvelles générations sont meilleures. Je n'ai donc rien contre Senna ou Prost. Ce sont mes héros pour toujours. Mais je pense que le niveau de Fernando et de Lewis était exceptionnel. Je me rappelle avoir étudié leurs données et pensé que ces gars-là étaient sur une autre planète."
De la Rosa est prompt à souligner que les coups bas étaient rares entre les deux champions. "Bien qu'ils ne l'aient jamais dit publiquement, ils ont toujours eu un immense respect l'un pour l'autre en piste, parce qu'ils savaient à quel point l'autre était bon. Et ils ne se sont jamais rien fait de mal en piste. C'était toujours une bataille acharnée mais fair-play – on ne se pousse pas, on ne casse pas l'aileron avant… Deux gladiateurs qui se battent courageusement sur la piste. Je n'en garde aucun mauvais souvenir."
Quant à savoir qui était plus rapide, il est bien difficile de départager ceux qui ont signé quatre victoires et 12 podiums chacun cette année-là, même si Hamilton avait l'avantage sur un tour : six pole positions à deux. De la Rosa, lui, ne peut pas choisir : "Tous les deux ! Ils étaient des pilotes différents. Différents, mais tous deux extrêmement rapides et talentueux."
"Je pense que Lewis a beaucoup appris de Fernando cette année-là, sa constance et sa gestion de la course – pas seulement des pneus – étaient dignes d'une masterclass. C'est à ce moment-là que Fernando a commencé à sentir que la télémétrie et les données jouaient en faveur de Lewis. Il s'est alors mis à ne pas piloter comme il le devrait en essais libres. Puis d'un coup, en qualifications, il était extrêmement rapide. Bref, ces deux grands gladiateurs faisaient tout pour se déstabiliser mutuellement."
Il conclut, avec regrets : "Je ne m'attendais pas à ce que leur relation explose. C'est dommage, car ces deux gars auraient remporté tant de championnats pour McLaren."
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