Analyse

AlphaTauri explique les difficultés du développement des F1 en 2022

Après un début de saison chaotique et beaucoup de pannes mécaniques, l'heure est venue pour les écuries d'apporter leurs premières grosses évolutions.

Pierre Gasly, AlphaTauri AT03

Pierre Gasly, AlphaTauri AT03

Red Bull Content Pool

Une nouvelle réglementation, d'autant plus lorsque les changements sont aussi radicaux qu'en 2022, représente une tâche de travail immense pour les écuries. Celles-ci ont dû apprendre à connaître leur nouvelle monture le plus rapidement possible, en collectant le plus de données pendant les sessions d'essais et en établissant des corrélations avec celles obtenues en soufflerie et à l'usine. De plus, le phénomène de marsouinage n'a pas vraiment aidé les équipes, en les forçant à trouver des compromis entre performance et confort du pilote. Avec le plafond budgétaire établi, les écuries ne peuvent plus se permettre de rater leurs améliorations, ce qui ajoute une pression supplémentaire sur les épaules des ingénieurs.

L'an dernier, AlphaTauri possédait la troisième ou quatrième voiture la plus rapide selon les week-ends, avec un Pierre Gasly régulièrement capable d'atteindre le top six des qualifications. Mais en 2022, l'écurie semble avoir régressé, avec des adversaires du peloton qui lui sont passés devant.

La façon dont AlphaTauri a abordé 2022 jusqu'à présent constitue une étude de cas intéressante, car elle reflète le type de défis auxquels toutes les équipes sont confrontées. Egginton confirme que son écurie a attendu de voir comment la voiture se comportait sur la piste avant de poursuivre activement la fabrication de nouvelles pièces.

"Comme toute équipe, nous avions des évolutions en réserve", affirme-t-il. "Nous avions des choses qui ont donné satisfaction dans la soufflerie, une gamme de pièces prêtes à être utilisées. Nous avons beaucoup appris, comme tout le monde l'aurait fait lors des essais hivernaux, puis nous avons participé à la première course. Il n'y a pas eu de surprises, mais il y a des spécificités de piste concernant le comportement du plancher, qui sont différentes de ce qu'elles auraient été dans les règlements précédents."

"Et puis nous avons appuyé sur le bouton 'go' pour certaines mises à jour basées sur ce que nous avons appris lors des essais hivernaux et de la première course, et nous en avons laissées d'autres sur la touche, où nous avons dit : 'Ce n'est pas la direction que nous devons prendre pour le moment'. C'est pourquoi nous avons un peu retardé la première mise à jour jusqu'à la quatrième course, juste pour nous assurer que nous faisions les bonnes choses et que nous étions sûrs d'aller dans le bon sens. Il y a eu beaucoup d'apprentissage au cours de ces deux derniers mois."

Yuki Tsunoda au volant de l'AlphaTauri AT03

Yuki Tsunoda au volant de l'AlphaTauri AT03

AlphaTauri a suivi une stratégie similaire à celle de Ferrari, en apportant peu de changements significatifs à la voiture, préférant ainsi en apprendre autant que possible sur sa version d'origine. Cette stabilité s'est avérée très précieuse. "Nous avons beaucoup travaillé sur les spécifications de base de la voiture", explique Egginton. "Comme d'habitude, nous avons travaillé sur les réglages mécaniques, mais nous avons également joué avec des évolutions très minimes sur l'aérodynamisme, le plancher, les supports de plancher, toutes ces petites choses, et nous avons essayé d'avoir une bonne lecture de tout cela et de corréler nos modèles réels et en CFD. Nous en sommes au point où nous avons imaginé certaines mises à jour basées sur notre apprentissage, principalement lors des essais hivernaux et de la première course, et ensuite c'est à nous de faire ce pas en avant. Mais jusqu'à présent, nous avons été très occupés par la collecte de données et l'apprentissage, avec beaucoup de petites mises à jour."

AlphaTauri n'a rejoint ses rivaux que récemment, en passant d'un tunnel de 50% à 60% de la taille réelle, désormais standard. Ce niveau de précision supplémentaire a été utile, même si la gestion du marsouinage reste un défi. "Cette voiture a été conçue à 60% de sa taille", confirme Egginton. "La corrélation entre la CFD, la soufflerie et la piste est donc assez bonne. Le domaine dans lequel nous n'avons pas toutes les réponses, et nous avons dû utiliser beaucoup de données de piste, est le marsouinage. Dans la soufflerie, ce n'est pas quelque chose qui est facile à activer, surtout avec un modèle."

"La CFD peut vous donner quelques tendances sur la façon dont ce phénomène peut affecter votre aérodynamisme, mais vous avez besoin d'une corrélation avec la piste. C'est ce que nous avons fait dans le cadre de ce processus, et maintenant nous sommes en position de nous dire : 'Ok, voici ce que nous voulons au plancher, voici les risques du marsouinage, voici comment nous pensons pouvoir les atténuer'. Il y a beaucoup de performance à obtenir du plancher. Mais si vous n'avez pas une bonne compréhension du phénomène de rebondissement, vous pouvez avoir un plancher très performant, mais vous ne pouvez pas courir dans la bonne fenêtre. Et donc, ce n'est plus un plancher très performant. Tout le travail que nous avons effectué en arrière-plan a consisté à nous assurer que nous savions clairement dans quelle direction nous voulions aller, avant de procéder à une mise à jour majeure."

Comme les autres équipes, et en parallèle de ses efforts pour améliorer l'aérodynamisme, AlphaTauri surveille de près le poids. Toutes les voitures de 2022 ont été conçues au-dessus de la limite de 795 kg, même après que la FIA l'ait augmentée de trois kilos à la dernière minute, durant les essais hivernaux à Bahreïn. Mais chez certains, le problème est plus grave que pour d'autres.

Pierre Gasly et Jody Egginton en 2019

Pierre Gasly et Jody Egginton en 2019

"Je pense nous sommes légèrement meilleurs que la moyenne", estime Egginton. "Vous ne savez jamais exactement où sont les autres équipes. Nous ne sommes pas aussi à l'aise que nous le voudrions, mais nous sommes raisonnablement bien. Nous voulons améliorer la situation, et je pense que c'est à peu près la même chose pour toutes les équipes, à des degrés divers. Mais je suis assez confiant, nous sommes loin d'être les pires sur la grille en ce moment. La limite de poids est un défi certain avec cette nouvelle réglementation. Il y a une surcharge de masse à cause des exigences de sécurité sur le châssis, des pièces standard, des roues, des pneus, il y a une surcharge de masse partout."

"Quand nous préparons la voiture, nous gardons un œil très attentif sur les pièces les plus lourdes de la voiture", poursuit l'ingénieur. "C'est quelque chose que nous évaluons constamment. Il y a eu de petites augmentations de la masse autorisées sur cette voiture au cours de sa phase de conception. Et nous nous sommes vraiment concentrés sur ce point. C'est un défi, c'est la première année de ce grand changement de réglementation. Et nous nous y attaquons maintenant. Nous ne sommes pas à l'aise, personne ne l'est jamais vraiment. Mais nous avons une bonne idée de ce que nous devons faire pour nous améliorer. C'est la même chose pour chaque équipe, vraiment, il est très facile de perdre le contrôle du poids avec une évolution, ou avec une mise à jour générale de fiabilité au cours de la saison. C'est une préoccupation majeure pour tout le monde. Et je suis sûr que ce sera comme ça toute l'année."

Perdre du poids coûte toujours de l'argent : il faut donc faire un compromis avec les développements qui ont un avantage plus clair en termes de performance. "Le plafonnement des coûts nous oblige à nous assurer que tout ce que nous faisons compte. Et si nous apportons une évolution parce que quelque chose est trop lourd, nous devons essayer d'éviter cela, vraiment. Tout le monde s'efforce de tirer le maximum de performance en dépensant le moins possible. Et si vous pouvez apporter de la performance à la voiture, et faire un nouvel aileron avant par exemple, tout en enlevant un peu de poids, alors vous avez un avantage aérodynamique, et potentiellement un avantage de masse. Si vous vous contentez d'enlever du poids à la voiture sans performance aérodynamique, c'est un peu douloureux. Donc nous essayons toujours de combiner cela. La première année, avec les règlements, vous essayez toujours d'exploiter la marge fine de la voiture."

Comme le note Egginton, l'enjeu est de trouver le moyen optimal de dépenser son argent. "Avec le plafond budgétaire, nous n'avons pas un porte-monnaie illimité. Vous devez faire preuve d'intelligence dans vos décisions, car vous devez faire travailler cet argent pour vous tout au long de l'année, et non pas l'utiliser pour certaines activités et réaliser que vous n'avez pas été à la hauteur en termes de performance de la voiture plus tard dans la saison."

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