Interview

Comment Red Bull apprend la vie sans Adrian Newey

Alors que Red Bull Racing se prépare au départ prochain d'Adrian Newey, Pierre Waché, le directeur technique de l'écurie autrichienne, est revenu en exclusivité pour Motorsport.com sur ce qui avait déjà changé depuis l'annonce du départ du légendaire technicien britannique.

Adrian Newey, directeur technique en chef, Red Bull Racing, observe la Ferrari de Charles Leclerc sur la grille

Au début de la saison, nous avons appris qu'Adrian Newey allait quitter l'équipe. En quoi cela a-t-il changé l'approche quotidienne des choses, si tel est le cas ? Comment voyez-vous cela ?

Il est clair que les retours et les conseils d'Adrian nous ont été très bénéfiques [par le passé]. Comme dans toute entreprise et dans la vie, il faut regarder vers l'avant, mais je ne veux pas négliger ce qu'il a fait pour l'équipe et ce qu'il a fait pour moi personnellement. C'est une personne très expérimentée, très intelligente et qui a connu beaucoup de succès. Cependant, désormais, c'est notre réalité. Notre travail au quotidien n'a pas fondamentalement changé, si ce n'est que nous n'avons plus personne pour regarder par-dessus notre épaule et nous dire 'hé, les gars, avez-vous pensé à ceci ou à cela ?' Mais fondamentalement, cela ne change pas ce que nous faisons.

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Quel degré d'implication avait-il encore dans la RB20 ? Était-il déjà moindre que les années précédentes ?

Je pense que c'était moins qu'avant, mais il était tout de même impliqué et dans l'équipe, à son poste, pour la RB20, vous savez. Mais nous formons une équipe, donc on ne calcule pas qui fait quoi exactement. Vous avancez en tant que groupe vers quelque chose, vers un objectif commun. C'est la même chose dans n'importe quelle entreprise : on ne dit jamais qu'untel a fait 10% du travail et qu'un autre en a fait 20%. Ce n'est pas ainsi que l'on travaille. Tout le monde cherche à fabriquer la meilleure voiture possible et, en fonction de son travail et de sa présence au sein de l'entreprise, on essaie de faire de son mieux. C'est ainsi que nous travaillons et si une personne n'est pas là, nous le faisons quand même.

L'organisation n'a pas changé parce que nous étions déjà organisés pour pouvoir nous débrouiller sans sa contribution.

Les rôles au sein de l'équipe technique ont-ils changé ou bien sont-ils restés les mêmes et, comme vous l'avez dit, il s'agit plus de ne plus avoir quelqu'un qui "regarde par-dessus" votre épaule ?

L'organisation n'a pas changé parce que nous étions déjà organisés pour pouvoir nous débrouiller sans sa contribution. Il est arrivé par le passé qu'il soit un peu moins présent à certains moments qu'à d'autres. L'aspect principal est que [sa contribution] n'est plus là, mais l'organisation n'a pas changé et il faut simplement faire sans ses retours. Nous nous organisons avec une équipe technique complète pour gérer la situation et regarder vers l'avenir, pas vers le passé.

Pierre Waché, le directeur technique de Red Bull Racing.

Pierre Waché, le directeur technique de Red Bull Racing.

Au sein de cette équipe technique, avez-vous le sentiment que tous les rôles sont bien couverts actuellement ?

Bien sûr. Si nous ne sommes pas satisfaits de quelque chose, nous essayons de le changer, nous essayons de le compenser. Je parle en mon nom : je ne suis pas parfait dans mon rôle, personne n'est parfait. L'essentiel est de ne jamais penser que l'on est parfait. Vous essayez d'employer des gens autour de vous pour compenser vos faiblesses, c'est ainsi que les choses doivent se passer. J'espère, et c'est ce que je vois, que toutes les personnes qui travaillent sous mes ordres sont meilleures que moi dans certains domaines, afin de compenser ce que je ne suis pas capable de faire moi-même.

C'est pourquoi nous travaillons ensemble. Nous sommes un groupe et nous formons un lien, ce n'est pas que l'un est plus faible que l'autre. Non, chacun a ses points forts et la capacité à travailler conjointement avec tous ces points forts est l'aspect le plus important. Un groupe où un seul individu fait tout n'existe pas, ce sont tous les individus qui travaillent ensemble.

Nous ne sommes pas ici pour que notre nom apparaisse dans les journaux. Nous sommes là pour rendre la voiture rapide.

L'accent est beaucoup mis sur Newey quand on parle de Red Bull, pensez-vous que l'on ne parle pas assez de vous et de personnes comme Ben Waterhouse (responsable de l'ingénierie de la performance) ou Enrico Balbo (responsable aérodynamique) ?

Je parle en mon nom et je connais très bien les personnes que vous venez de mentionner : nous ne sommes pas ici pour que notre nom apparaisse dans les journaux. Nous sommes là pour rendre la voiture rapide. Nous sommes payés par l'équipe et nous sommes motivés pour gagner. La meilleure récompense pour nous est de gagner toutes les courses de la saison et nous avons manqué cet objectif d'une course l'année dernière. Notre plus belle récompense a été l'année dernière, lorsque nous avons créé la voiture et qu'elle a connu un énorme succès. Avec les pilotes et toute l'équipe, nous sommes ici principalement pour ça.

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Concernant les questions de corrélation avec l'ancienne soufflerie, est-il juste de dire que la limitation se situe davantage au niveau de l'infrastructure de l'équipe qu'au niveau de l'équipe technique elle-même ?

Bien sûr, les gens sont les meilleurs [rires]. Non, évidemment c'est une blague ! Mais il est vrai que l'on trouve toujours une limite à ce que l'on fait. Ce que nous avons créé est également dû aux personnes que nous avons et nous sommes le plafond de tout ce que nous faisons. C'est pourquoi nous travaillons chaque jour à l'amélioration de ce plafond et des outils. Si vous utilisez vos outils correctement, ce sont vos outils qui commencent à devenir votre limite. C'est le cas, par exemple, des simulations.

La soufflerie Red Bull.

La soufflerie Red Bull.

Même si nous sommes les meilleurs par rapport aux autres dans certains aspects, il y a d'autres domaines où nous devons encore progresser. La soufflerie est l'un d'entre eux et c'est pourquoi nous commençons à développer une soufflerie pour les prochaines années. L'entreprise nous a donné la possibilité de la modifier en nous donnant de l'argent. Nous en sommes très reconnaissants, car je pense qu'il s'agit d'un investissement pour les performances futures.

Est-ce que tout ce qui se passe dans le monde virtuel a aujourd'hui plus d'importance que les personnes elles-mêmes, notamment parce qu'il n'y a plus beaucoup d'essais en piste ?

Eh bien, ce n'est pas encore le plus important, la performance principale vient toujours des gens. Cependant, comme dans toute organisation, si vous n'avez pas d'outils à cet effet, les personnes ne vous apporteront rien. C'est donc une combinaison. Le succès de Red Bull - je ne peux pas parler pour les autres - est déterminé par une combinaison de ces deux aspects.

Propos recueillis par Ronald Vording

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