Pourquoi AlphaTauri ne sera plus une couveuse F1 pour Red Bull
Longtemps cantonnée au rôle de couveuse, l'écurie AlphaTauri va changer d'objectif en même temps qu'elle va, à nouveau, changer d'identité en 2024.
À l'aube de la saison 2024, il semble presque anachronique de parler de l'écurie "AlphaTauri". L'on sait en effet depuis plusieurs mois que la structure de Faenza va de nouveau changer d'identité, quatre ans après avoir troqué sa première peau, Toro Rosso, contre celle de la marque de mode de Red Bull.
Tout aussi anachronique sera désormais le fait de parler de "junior team" du géant de la boisson énergisante. Si cela était encore vrai il y a quelques années, l'objectif de servir exclusivement de couveuse pour les jeunes pousses du programme autrichien n'est plus. La montée en puissance de Max Verstappen, 18 ans au moment de son arrivée chez Red Bull, et le recrutement de Sergio Pérez en tant que second pilote ont quelque peu fini de faire dérailler cette articulation entre les deux structures, déjà quelque peu affaiblie par un creux dans le vivier de talents de la marque.
Après la mort de Dietrich Mateschitz, un œil nouveau a été porté sur les performances d'AlphaTauri. Et dans le clan Red Bull, il n'est plus question de se satisfaire de simplement exister : désormais, il va falloir se montrer performant. Si le changement d'identité, qui devrait être officialisé dans les prochains jours, est avant tout symbolique à cet égard, ce sont les changements dans l'organigramme, le choix des pilotes et dans les moyens mis en œuvre qui sont évidemment les plus révélateurs.
Exit Franz Tost, qui incarnait le modèle du junior team par sa présence à la direction de l'écurie depuis 2006, remplacé par un duo composé de Peter Bayer au poste de PDG et de Laurent Mekies au poste de directeur. Fini, aussi, l'orientation technique trop indépendante de celle de Red Bull Racing : désormais, la collaboration sera renforcée avec l'achat de plus d'éléments et l'installation d'ingénieurs sur le campus de Milton Keynes. Côté pilotes, l'expérimenté Daniel Ricciardo a fait son retour, et il sera aligné aux côtés d'un pilote certes encore jeune, mais qui disputera sa quatrième saison en F1, Yuki Tsunoda.
"Les actionnaires, lorsqu'ils ont redéfini les choses, ont également dit : 'Nous voulons que vous soyez compétitifs'", a résumé Bayer. "Franz dit toujours, et honnêtement je suis d'accord à 100%, qu'un jeune pilote a besoin de trois ans pour être prêt pour la F1."
"Avec toute la complexité que la discipline exige actuellement, et la quantité d'informations qu'ils doivent digérer et traiter, puis nous communiquer à nouveau, afin que nous comprenions en tant qu'équipe ce qu'il faut faire, comment changer les réglages, etc. et être compétitifs, ils ont tout simplement besoin de beaucoup de temps."
Peter Bayer, PDG d'AlphaTauri.
Bayer a vu dans les échanges radio entre Liam Lawson, qui a remplacé Daniel Ricciardo pendant cinq Grands Prix après sa blessure à la main, et le stand AlphaTauri en 2023 un indicateur de la complexité inhérente au rôle de pilote dans la F1 actuelle. Une complexité qui tend selon lui à rendre les choses bien moins simples en week-end de Grand Prix.
"Avec un jeune pilote, le message passe de la salle des opérations aux ingénieurs, du stand au pilote : 'Fais constamment attention dans ce virage. Assure-toi que les réglages sont bons', ou 'Freine plus tard, freine plus tôt, surveille la direction, surveille l'arrière, surveille le freinage moteur. Au fait, il y a quelqu'un qui arrive derrière toi'."
"Honnêtement, c'est comme dans un théâtre [...]. Alors qu'avec Daniel, c'est calme. Et une fois par tour, il prend la radio et dit : 'Les gars, [il y a] un problème avec l'arrière, pouvez-vous jeter un coup d'œil ?'. 'Oh, oui, nous voyons une surchauffe, nous pouvons agir sur le différentiel'. Et c'est réglé."
"Ou bien il reprend la radio après trois ou quatre tours et dit : 'Vous avez pensé à changer de stratégie ? Parce que, là, je suis coincé dans un train DRS, et plutôt que d'attendre, pourquoi ne pas...'. 'Ouais, bonne idée !'. Vous sentez la différence. Et puis, évidemment, le travail que nous faisons avec lui en simulateur, du côté de la performance du véhicule, ça change la donne dans ce domaine."
"Donc, [le modèle c'est] un pilote expérimenté qui prend un jeune sous son aile. Et ce jeune doit également être préparé."
L'alliance entre Yuki Tsunoda et Daniel Ricciardo symbolise la nouvelle orientation d'AlphaTauri.
Peter Bayer explique d'ailleurs que désormais, pour préparer l'arrivée dans l'écurie d'une jeune pousse, le modèle suivi par d'autres structures, à savoir de mettre en place un programme intensif d'essais avec des voitures vieilles de deux ans, qui ne sont pas limités par la réglementation, sera suivi. Cela est d'autant plus intéressant à compter de 2024 que les monoplaces 2022, de la même génération que les F1 qui seront dévoilées dans les prochaines semaines, vont pouvoir être utilisées.
"C'est un autre domaine qui sera nouveau pour nous", a-t-il déclaré. "Nous voulons utiliser une partie de l'argent que nous gagnons actuellement pour nous assurer que nous pouvons préparer les jeunes pilotes de la meilleure façon possible."
"Je pense qu'Oscar Piastri en est le meilleur exemple. Il a parcouru je ne sais combien de centaines ou de milliers de kilomètres [avec Alpine], et il est arrivé en comprenant la voiture. Il comprenait la dynamique, il comprenait les boutons [sur le volant], et cela fait une grande différence, et donc cela vous connecte complètement."
"Et nous avons un gros programme pour Liam et Isack [Hadjar] et potentiellement [Ayumu] Iwasa, et nous voulons nous assurer de les faire rouler autant que possible. Il est intéressant de noter que la 'voiture précédente' [selon la dénomination officielle du Règlement Sportif] est une voiture de 2022, donc c'est enfin une voiture pertinente."
Avec Adam Cooper
Rejoignez la communauté Motorsport
Commentez cet articlePartager ou sauvegarder cet article
Voir aussi :
Meilleurs commentaires
Abonnez-vous pour accéder aux articles de Motorsport.com avec votre bloqueur de publicité.
De la Formule 1 au MotoGP, nous couvrons les plus grands championnats depuis les circuits parce que nous aimons notre sport, tout comme vous. Afin de continuer à vous faire vivre les sports mécaniques de l'intérieur avec des experts du milieu, notre site Internet affiche de la publicité. Nous souhaitons néanmoins vous donner la possibilité de profiter du site sans publicité et sans tracking, avec votre logiciel adblocker.